Par Jacques Matand.
Roger Lumbala, député national élu lors des dernières législatives, vice-président du groupe parlementaire Union pour la démocratie et le progrès social/Forces acquises au changement (UDPS/FAC) à l’Assemblée nationale, a officialisé son soutien aux rebelles du M23. Rebelles qui combattent les troupes de l’armée nationale Congolaise dans la province du Nord-Kivu depuis mai 2012.
Du même côté que le président
Sa position a de quoi surprendre d’aucuns. Soupçonné, par les autorités Congolaises, de complicité et d’accointance avec les rebelles du M23 en septembre 2012, Roger Lumbala a tout nié en bloc. Dans une interview accordée à Jeune Afrique, le Président du RDC-N, dont la femme siège encore au Sénat Congolais, a laissé croire, par un syllogisme, que c’est plutôt le président Congolais Joseph Kabila qui soutenait ces rebelles et d’autres groupuscules actifs dans l’est du Congo en leur fournissant armes, munitions et médicaments.
Ce même Roger Lumbala qui dit aujourd’hui comprendre les revendications des rebelles du M23, est celui qui a soutenu Etienne Tshisekedi, président de l’Udps et leader de l’opposition congolaise, pendant la présidentielle de novembre 2011. Après la défaite de l’opposition congolaise à la présidentielle, il prend ses distances d’avec Etienne Tshisekedi, l’opposant historique Congolais. Roger Lumbala avait fait, en son temps, une différence entre les revendications politiques de l’opposition congolaise et les revendications militaires du M23.
Aujourd’hui, le distinguo n’est plus net et tout se mêle. Roger Lumbala comprend tout du M23. Leurs revendications et méthodes de lutte. L’utilisation des armes par les rebelles est, d’après Roger Lumbala, , le langage que le Président congolais comprend le mieux. Lui même a été ancien rebelle dans le RCD (Rassemblement congolais pour la démocratie) puis le RCD-N, son propre parti.
Comme s’il vient tout à coup d’oublier qu’il avait soupçonné le président Congolais de donner un coup de pouce aux rebelles qu’il a rejoint aujourd’hui. Utilisons un temps soit peu aussi son syllogisme. Si Joseph Kabila donne un coup de coupe aux rebelles que Roger Lumbala soutient, ils se retrouvent tous du même côté. Du coup, il ne devrait plus être considéré comme un opposant, vu qu’il ne s’oppose pas à son allier qui soutiendrait les actuels rebelles.
Parmi les revendications des mutins du M23, il y a le respect des accords du 23 mars dont ils demandent le respect par les autorités de Kinshasa. Même cette revendication, Roger Lumbala la comprend et estime que le président Joseph Kabila a protégé d’anciens rebelles du CNDP dont le M23 est l’émanation.
De deux choses l’une. Soit le député national a perdu la tête ou il est devenu une marionnette politique en quête de positionnement. Dans le M23, il sera vite mis à contribution dans les négociations avec le gouvernement Congolais. Alors qu’il n’y a pas longtemps, le même Roger Lumbala manifestait ses distances d’avec les rebelles du M23. Son soutien au M23 vient confirmer les soupçons et les doutes que les autorités de Kinshasa avaient émis sur ses liens avec les rebelles.
A voir son parcours, l’on serait tenté de dire que Roger Lumbala revient à sa nature d’ancien rebelle. A-t-il vu dans la rébellion du M23 le fait qu’on lui volait la vedette alors qu’il fut un temps où on parlait de lui en tant que rebelle?
Roger Lumbala est connu pour ses positions virulentes contre le président Congolais et le pouvoir de Kinshasa qu’il soupçonne à tord ou à raison d’être une émanation de Kigali. En même temps, le M23 serait aussi soutenu, selon plusieurs rapports, par le Rwanda. A moins que ce député ne l’ignore. En soutenant le M23, il serait entre les mains des mêmes forces contre lesquelles il a été opposé.
Serait-il entrain de jouer une comédie dans la scène politique congolaise? Ou bien, c’est sa nature de rebelle qui prend le dessus sur l’opposant qu’il a été pendant un moment?
Le grand-écart
Sur la scène politique congolaise, il n’est pas surprenant de voir certains opposants quitter leur camp pour rejoindre celui de la majorité présidentielle au pouvoir. Mais, de l’opposition à la rébellion, Roger Lumbala vient de faire un grand-écart pour ce début d’année.
Son parti et ses électeurs pourront toujours être fier de leur élu de Miabi, province du Kasaï Oriental, la même province que Etienne Tshisekedi.
Avec Roger Lumbala l’on assiste au parcours d’un ancien rebelle devenu opposant, l’opposant redevenu rebelle. Si les revendications politiques du M23 sont entendues à l’issue des négociations à Kampala, ces rebelles deviendront probablement opposants, avant d’avoir de la sympathie pour une autre éventuelle rébellion si le cycle continue.
Jacques Matand’
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